Un bailleur qui ne justifie pas la réalité des charges facturées devra restituer les provisions perçues à ce titre au preneur

Le 21 octobre 2020

Cass. Civ. 3ème, 17 septembre 2020, n°19-14.168

 

 

Dans un nouvel arrêt rendu par la 3ème chambre civile, la Cour de Cassation confirme que le bailleur qui entend conserver les provisions sur charges qu’il a reçu de son preneur, doit justifier du montant des dépenses. A défaut, il doit lui restituer les sommes versées au titre des provisions.

Une telle position n’est pas nouvelle dès lors que la Cour de Cassation a déjà eu l’occasion de sanctionner les bailleurs en leur imposant de rembourser les provisions sur charges tant en l’absence de régularisation des charges (Cass. 3ème civ., 5 novembre 2014 n° 13-24.451), qu’en l’absence de production de justificatif des charges (Cass. 3ème civ., 9 juin 2015 n°14-13.555).

La décision commentée, qui porte sur un bail conclu avant l’entrée en vigueur de la loi PINEL, s’inscrit dans la même lignée jurisprudentielle.

En l’espèce, à la suite de la résiliation d’un bail commercial aux termes duquel il était prévu que le preneur rembourse au bailleur un certain nombre de dépenses annuelles, le bailleur a assigné le garant solidaire du cessionnaire à lui payer diverses sommes au titre d’un arriéré locatif.

En réponse, le garant a demandé la restitution des provisions appelées au titre des charges et de la taxe foncière au motif que la créance en remboursement de dépenses au titre de ces mêmes charges et impôts n’était pas établie.

La Cour d’Appel de PARIS ayant fait droit à la demande du garant, le bailleur a formé un pourvoi en cassation.

La Cour de Cassation a suivi le raisonnement de la Cour d’appel de PARIS et a jugé que le bailleur, qui ne démontrait ni l’existence ni le montant des dépenses auxquelles les provisions versées par le preneur auraient dû être affectées, n’était pas en mesure d’établir sa créance et devait en conséquence restituer au preneur les sommes versées au titre des provisions.

L’exigence de justification de ces charges facturées au locataire est renforcée par la loi PINEL.

En effet, en application des articles L.145-40-2 et R.145-36 du Code de commerce, les baux commerciaux conclus ou renouvelés après le 20 juin 2014 doivent désormais comporter un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés au bail, lequel donne lieu à un état récapitulatif annuel adressé par le bailleur au preneur incluant la liquidation et la régularisation des comptes de charges. Cette communication doit intervenir au plus tard le 30 septembre de l’année suivante.

Pour rappel, le bailleur doit également communiquer, si le preneur en fait la demande, tout document justifiant le montant des charges.

Même si le législateur n’a pas prévu de sanctions spécifiques en cas d’inobservation de ces dispositions par le bailleur, nul doute que la sanction serait a minima identique à celle dégagée par la Cour de cassation pour les baux non soumis à la loi PINEL, le cas échéant, du fait de l’inobservation des délais précités.

Il est donc essentiel pour le bailleur de contrôler rigoureusement la refacturation de ces charges tant au moment des appels que des régularisations annuelles afin d’éviter toute mauvaise surprise et ce d’autant que le preneur peut demander, en cas d’inobservation régulière de ces dispositions, le remboursement des provisions sur les 5 dernières années.

En bref

Dès lors que le bailleur ne justifie pas de la réalité et du montant de sa créance, le preneur peut demander le remboursement des provisions sur charges locatives.

Références

  • 3ème civ., 5 novembre 2014 n° 13-24.451
  • 3ème civ., 9 juin 2015 n°14-13.555

Partager l'article