JURISPRUDENCE – Construction – Les panneaux photovoltaïques : le régime de garantie dépend du mode de pose
Le 27 janvier 2023
La Cour de cassation a rendu une nouvelle décision concernant les panneaux photovoltaïques.
Cette décision était très attendue car elle porte sur un problème sériel affectant les boitiers de connexion des panneaux photovoltaïques.
Plusieurs cours d’appel ont été saisies de ce sujet et ont tranché dans des sens différents.
La Cour de cassation vient donc trancher cette divergence de jurisprudence.
Cass, civ 3, 21 septembre 2022 n° 21-20.433
Cette décision répond à la question de savoir si les désordres affectant les boitiers de connexion de panneaux photovoltaïques intégrés en toiture peuvent être soumis à la garantie décennale.
En l’espèce, une société a confié à un constructeur, l’installation, en toiture d’un bâtiment dont la couverture avait été préalablement déposée, d’une unité de production d’énergie solaire comportant des panneaux photovoltaïques équipés de boîtiers de connexions.
Peu de temps après l’installation, le maître d’ouvrage a constaté plusieurs incidents de productions.
Les désordres avaient pour origine un défaut sériel affectant les boîtiers de connexion c’est-à-dire un accessoire du panneau voltaïque parfaitement dissociable.
Le maître d’ouvrage a assigné le constructeur ainsi que les fabricants des panneaux photovoltaïques et des boitiers de connexion.
La Cour d’appel de PAU, dans un arrêt en date du 23 mars 2021, a considéré que la garantie décennale ne pouvait pas être activée aux motifs que :
- les panneaux photovoltaïques étaient des éléments d’équipement dissociable,
- les désordres portaient atteinte à la destination de l’équipement mais pas à l’ouvrage dans son ensemble dans la mesure où la fonction couverture est assurée,
- l’installation de production d’électricité avait pour fonction exclusive de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage.
La Cour de cassation a censuré la décision rendue par la Cour d’appel.
La Cour de cassation considère que la garantie décennale de l’entreprise est engagée car :
- les panneaux photovoltaïques sont des ouvrages car ils participent « de la réalisation de l’ouvrage de couverture dans son ensemble, en assurant une fonction de clos, de couvert et d’étanchéité du bâtiment» Dans ces conditions, Il importe peu que les panneaux photovoltaïques ou les boitiers de connexion soient dissociables.
- les désordres rendent l’ouvrage impropre dans son ensemble en raison d’un risque avéré d’incendie de la couverture du bâtiment.
- la fonction n’est pas exclusivement professionnelle, puisque les panneaux mis en place assurent également le clos et le couvert.
En tout état de cause, il faut rappeler seuls les éléments d’équipement dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage ne sont pas soumis à la garantie décennale. Or, en l’espèce, la Cour de cassation n’a pas retenu cette qualification d’éléments d’équipement.
Dans ces conditions, les désordres sont garantis au titre de la garantie décennale.
Pour rappel, en principe, seuls les ouvrages et les éléments d’équipement indissociables sont soumis à la garantie décennale. Les éléments d’équipement dissociables eux ne bénéficient en principe que de la garantie de bon fonctionnement de deux ans à compter de la réception.
Cependant, les désordres affectant des éléments d’équipement dissociables sont soumis à la garantie décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage impropre à sa destination dans son ensemble.
Par ailleurs, les équipements dissociables ou non sont exclus de la garantie décennale lorsqu’ils assurent une fonction exclusivement professionnelle.
Dans ces conditions le régime applicable aux panneaux photovoltaïques est différent selon s’ils sont intégrés en toiture ou non.
Lorsqu’ils sont intégrés en toiture, ils sont qualifiés d’ouvrage et bénéficient de la garantie décennale.
En revanche, lorsqu’ils ne sont pas intégrés en toiture mais installés en superposition, ils sont alors qualifiés d’éléments d’équipement et ne bénéficient que de la garantie de bon fonctionnement de deux ans sauf à ce qu’ils portent atteinte à l’ouvrage dans son ensemble.
Avocat