JURISPRUDENCE – Le droit de préemption du locataire commercial peut s’appliquer à des locaux à usage de bureaux

Le 28 mars 2022

Aux termes d’un arrêt en date du 1er décembre 2021, la Cour d’appel de Paris a jugé que les locaux à usage exclusif de bureaux bénéficient du droit de préemption prévu par l’article L.145-46-1 du Code de commerce (CA Paris, 1er janvier 2021, n°20/00194).

Pour rappel, l’article L.145-46-1 du Code de commerce, issu de la Loi PINEL du 18 juin 2014, confère au preneur à bail commercial un droit de préemption en cas de vente du local par le bailleur.

Aux termes de la loi, ce droit de préemption ne concerne que les locaux « à usage commercial ou artisanal ».

Cette référence semble donc exclure l’application du droit de préférence au local industriel ou au local loué à usage de bureaux (Le nouveau droit de préemption du locataire commercial – Frédéric Planckeel – AJDI 2014. 595 ; Le domaine du droit de préemption du locataire commercial – Bernard-Henri Dumortier – AJDI 2015. 759).

En outre, en ce que le droit de préemption instaure au profit du locataire une limite au droit de propriété du bailleur, il semblerait évident de considérer que l’on ne peut adopter une interprétation extensive de l’article L.145-46-1 du Code de commerce.

Toutefois, dans un arrêt du 1er décembre 2021, la Cour d’appel de Paris retient que les locaux à usage de bureaux ne sont ni inclus expressément, ni exclus expressément du champ d’application de ce texte et qu’il convient de tenir compte de l’activité exercée dans les locaux.

En l’espèce, une promesse de vente avait été consentie à l’occasion de la vente de locaux à usage de bureaux, loués au titre d’un bail commercial.

Le preneur ayant notifié son intention d’user du droit de préemption prévu par l’article L.145-46-1 du Code de commerce, la vente fut finalement réalisée à son profit.

Les bénéficiaires de la promesse ont alors sollicité la nullité de la vente et sa régularisation à leur profit.

La Cour d’appel de Paris, notamment interrogée sur l’applicabilité de l’article L.145-46-1 du Code de commerce, relève que « selon la clause de destination du bail, les locaux sont destinés à l’usage exclusif de bureaux, pour l’activité d’administrateur de biens, syndic de copropriété, location, transaction », pour ensuite souligner que « cette activité est une activité commerciale par application des dispositions de l’article L. 110-1 du code commerce ».

Par conséquent, elle en déduit que les locaux loués étaient affectés à un usage commercial de sorte que le preneur bénéficiait d’un droit de préemption dans le cadre de la vente.

Cet arrêt semble tendre à l’application du droit de préemption prévu à l’article L.145-46-1 du Code de commerce à la vente des locaux à usage de bureaux « affectés à un usage commercial ».

Ces locaux seraient ainsi soumis au droit de préemption s’ils permettent l’exercice d’une activité commerciale. Il conviendrait donc de faire la distinction entre l’usage du local, c’est-à-dire la destination contractuelle des lieux, et l’activité qui y est exercée, pour déterminer si il est nécessaire ou non de purger le droit de préemption issu de l’article L.145-46-1 du Code de commerce.

Une telle solution risque de conduire à de nombreux litiges tant le critère autour de l’exercice d’une activité commerciale peut être sujet à discussion.

A titre d’exemple, certaines activités réputées libérales sont exercées à travers une société commerciale de type SARL.

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